Archives de Tag: crise économique

Perspectives sur la politique britannique

D’abord un long article publié dans Newsweek qui s’adresse donc à des non-Britanniques et propose un bon résumé de la situation actuelle, en focalisant sur David Cameron, avec toujours en parallèle l’arrivée au pouvoir de Tony Blair en 1997.

Dans le Times de ce matin (19/10), la chronique de William Rees-Mogg, qui explique pourquoi, finalement, un gouvernement minoritaire (hung parliament) n’est pas totalement exclu (aucun des partis n’atteignant la majorité absolue de sièges à la Chambre des Communes, nécessaire pour gouverner).

C’est une hypothèse que les chroniqueurs de la presse quotidienne ressortent de temps en temps. Elle est statistiquement possible dans la mesure où l’écart entre les Conservateurs et les Travaillistes est important, mais sans être considérable, et où des reports de voix finalement assez minces peuvent avoir des conséquences très importantes en termes de sièges. Néanmoins, à en croire les sondages actuels, on se dirigerait vers une majorité conservatrices  confortable, mais sans plus. Ce qui pourrait laisser présager des élections de sortie de crise, après 2 ou 3 ans, afin de donner une plus grande majorité aux Conservateurs (ce qu’avaient fait les Travaillistes en 1966, après leur très courte victoire de 1964 – ce qui ne les avait pas empêché de perdre à la surprise générale en 1970).

Lauric Henneton

Cour suprême, Europe, universités

Education:

le nouveau président (vice chancellor) de l’Université d’Oxford, qui a auparavant travaillé à Princeton et Yale, voudrait que les bourses d’Oxford (déjà généreuses) soient augmentées afin de permettre aux étudiants méritants mais d’origine modeste d’avoir la possibilité de faire leurs études dans cette université prestigieuse. Evidemment, la question soulevée indirectement est celle des frais de scolarité (tuition fees).

Cour suprême:

le Royaume-Uni a maintenant sa propre cour suprême, indépendante du Parlement (anciennement partie de la Chambre des Lords). Q&A sur la BBC pour tout savoir en quelques minutes. Voir également cette petite vidéo.

Europe:

Un papier dans The Independent sur l’euroscepticisme en relation avec le référendum irlandais, les positions de David Cameron et le rapprochement franco-allemand. Moralité: contrairement à ce qu’on pense généralement, l’euroscepticisme n’est pas uniquement l’apanage de la droite (donc des Conservateurs).

Voir également deux papiers un peu contradictoires sur la relation franco-allemande à la suite des élections législatives allemandes du 27/09. Charles Bremner dans le Times voit dans la nouvelle convergence franco-allemande, bientôt formalisée par un traité, la mise sur la touche du Royaume-Uni, alors que, dans Slate.fr Eric Le Boucher insiste sur les divergences entre la France et l’Allemagne, notamment au niveau des grandes orientations économiques (politique de l’offre contre politique de la demande). En filigrane, à nouveau, cela pousse à s’interroger sur la place du Royaume-Uni dans l’UE, mais aussi sur les dynamiques entre les grandes organisations supranationales (ONU, OTAN, UE etc.)

Lauric Henneton

Elections européennes : update

Une synthèse brève mais complète des gagnants et des perdants des européennes en Grande-Bretagne, sur Politics.co.uk (Ian Dunt).

Egalement un petit papier sur la défaite historique des Travaillistes au pays de Galles (un véritable séisme politique dont on a du mal à prendre la mesure en France).

A suivre: lundi soir, réunion des députés travaillistes, il faudra surveiller les prises de position. Il n’est pas impossible (même si ce n’est pas le scénario le plus probable) que ce soit le dernier jour (un des derniers jours) de Gordon Brown au Number 10.

Lauric Henneton

Brit.Pol.Briefing

Un article du Daily Telegraph relate que d’après un sociologue britannique, les inégalités sociales s’accroîtraient, malgré le voeu de Tony Blair d’atteindre une « société sans classes » (classless society). Les enfants des classes « ouvrières » sont toujours moins nombreux que ceux des classes moyennes à aller à l’université, par exemple.

Le Daily Express publie une enquête sur la confiance des Britanniques, notamment envers les politiques, en ces temps de scandales à répétition. Et c’est la Reine en qui ils font le plus confiance (avec une vidéo).

Le blog conservateur très influent ConservativeHome a mené une enquête intéressante auprès des rédactions des principaux quotidiens nationaux, pour savoir en faveur de qui ils se prononceraient lors de la prochaine campagne électorale. L’occasion de faire le point sur les positions politiques des organes de presse anglais.

Enfin, un long extrait d’un livre à paraître sur la Grande-Bretagne dans les années 1970, extrait consacré à la semaine de trois jours (« three-day week ») sous le gouvernement d’Edward Heath (1970-1974), et notamment pendant l’hiver 1973. Très bien documenté grâce à des extraits des journaux de l’époque, ce texte passionnant permet de mieux comprendre la vie des Britanniques pendant cette période troublée sur le « front » socio-politique. Ne vous laissez pas intidimider ou décourager par l’apparente longueur de l’article, ça se lit comme un roman.

L’article est accompagné d’un carnet photo qui permet d’encore mieux visualiser.

A telephonist works by torchlight at the start of the three day week, which was introduced at midnight on 31 December 1973 Photograph: /Hulton

A telephonist works by torchlight at the start of the three day week, which was introduced at midnight on 31 December 1973 Photograph: /Hulton

Lauric Henneton

Brit.Pol.Briefing (3)

La semaine politique

Deux récapitulatifs en vidéo de la semaine en politique, avec notamment la couverture du sommet du G20 et la présence de Barack Obama, mais pas uniquement (heureusement):

– l’un, humoristique, par Matthew Wright de BBC Five

– l’autre, pastiche de Top of the Pops, extrait de l’émission Daily Politics


A gauche, du nouveau

Un article du magazine travailliste Progress sur le renouveau idéologique de la gauche britannique, ce qui montre bien le décalage entre les idées de la base et ceux qui sont censés les mettre en oeuvre.

Indépendance écossaise

Enfin, un récapitulatif des sondages sur l’indépendance écossaise compilé par le UK Polling Report, excellente base de données en matière de sondages.

Lauric Henneton

Vidéo: Un thriller politique: La chute du gouvernement Callaghan (mars 1979)

James Callaghan

James Callaghan, la victime

BBC Parliament a diffusé il  y a quelques jours un documentaire très bien fait qui revient sur la chute du gouvernement travailliste de James Callaghan (1976-1979), en mars 1979, suite à une motion de censure des nationalistes écossais, dans le contexte social très tendu du ‘Winter of Discontent‘.  Ce documentaire d’une heure peut à présent être consulté en ligne, gratuitement.

De facture assez classique, il fait intervenir les protagonistes de l’époque (encore vivants), qui ont tous pris 30 ans (et ont presque tous été annoblis). Cependant, il permet de bien comprendre la situation générale du pays, notamment le contexte politique et social, et les différentes questions qui se télescopent (l’inflation, les revendications salariales, les grèves, la dévolution).

Le documentaire permet également de bien comprendre le fonctionnement du Parlement, et met en avant le rôle des ‘whips‘, charger de s’assurer que, lors des votes cruciaux où toutes les voix sont nécessaires, aucune défection ne sera à déplorer, lesquelles pourraient, dans certains cas, faire chuter le gouvernement.

Ici, l’histoire est bien connue (mais la narration est habile): on savait que l’issue du vote ne tiendrait qu’à un fil, ou plutôt une voix, et c’est ce qui s’est passé. La Chambre des Communes, par 311 voix contre 310, n’a pas accordé sa confiance au gouvernement Callaghan, qui a dû démissionner et provoquer des élections législatives au début du mois de mai. C’est à l’issue de ce scrutin que Margaret Thatcher, leader du Parti conservateur depuis 1975, est devenue Premier ministre.

A la suite, il y a une vidéo de George Cunningham, député travailliste écossais à l’origine de l’amendement qui stipulait que 40% de l’électorat (inscrit) écossais devait approuver le projet de dévolution pour que la loi votée l’année précédente soit appliquée. Une majorité simple ne suffisait pas, et c’est ce qui s’est passé: 51% de « oui » mais pas assez de votants. C’est à l’issue de cet échec, début mai, que le Scottish National Party (SNP) a déposé une motion de censure (vote of no confidence) contre le gouvernement Callaghan.

Dans son discours, le soir du vote (28/03/1979), Callaghan a dénoncé l’alliance contre-nature qui s’opposait à son gouvernement: les Conservateurs opposés à une dévolution qui signifiait pour eux le démantèlement de l’Union, un SNP qui voyait dans la dévolution un premier pas vers l’Indépendance de l’Ecosse, et les Libéraux, qui étaient favorables à la dévolution.

Lauric Henneton

Chambre des Communes, Westminster

Chambre des Communes, Westminster: le lieu du crime

Perspective sur le déclin

Sir Nicholas Henderson (Photo@Times)

Sir Nicholas Henderson (Photo@Times)

Sir Nicholas Henderson, ambassadeur britannique en France de 1975 à 1979, après avoir été en poste en Pologne et en RFA, est mort le 16 mars dernier (il avait aussi été ambassadeur à Washington de 1979 à 82).

Il est surtout connu pour une note, rédigée alors qu’il quittait son poste parisien, qui met en perspective le déclin du Royaume-Uni d’après guerre et publiée par The Economist. De son rang de puissance mondiale, le Royaume-Uni était devenu une puissance secondaire, notamment après Suez (1956), dépassée dans tous les domaines, notamment économiques, par la France et la RFA que Henderson connaissait bien pour y avoir vécu plusieurs années. La relation entre économie et politique étrangère apparaît clairement, de même que la position ambiguë vis-à-vis de l’Europe et de ses diverses incarnations institutionnelles (CECA, CED, CEE…).

Il s’agit d’un document, certes un peu long, mais passionnant sur toute une période, avec le point de vue de 1979. La note n’a pas été rédigée pour être publiée, ce qui lui donne une valeur encore plus grande.

Voir les nécrologies du Daily Telegraph, du Times et du Guardian, pour « revisiter » la période 1945-1979, ou « consensus d’après guerre », la période que l’on associe généralement à la longue phase de déclin britannique avant le (long) redressement entamé sous Thatcher et poursuivi par ses successeurs, un redressement dont on mesure la fragilité aujourd’hui.

Lauric Henneton

Brit.Pol.Briefing (2)

Gestion de l’immigration

Hazel Blears (secrétaire d’état aux « communautés ») annonce que les immigrants (hors UE) devront s’acquitter d’une sorte de droit d’entrée de £50 pour participer aux dépenses induites par l’immigration. La polémique ne s’est pas fait attendre: à gauche on pense que c’est une stigmatisation de l’immigration, à droite on estime que c’est « trop peu, trop tard ».

Phil Woolas, ministre en charge de l’immigration, a annoncé de son côté qu’un projet franco-britannique de centre de rétention des candidats à l’immigration allait voir le jour près de Calais. Problème: ses collaborateurs n’étaient pas au courant (ce n’est pas la première fois) et son homologue français, Eric Besson, trouve l’idée d’un « nouveau Sangatte » ridicule.

David Cameron et le Conservatisme progressif

Dans le Spectator, David Cameron publie une tribune dans laquelle il explique entre autres que les Conservateurs ne doivent pas simplement profiter du mécontentement populaire à l’encontre des Travaillistes et remporter une victoire par défaut, mais remporter une véritable victoire fondée sur un vote d’adhésion. Les raisons qu’il donne de voter Conservateur restent assez floues, au-delà des déclarations d’intention. L’idée générale est de rendre « le pouvoir au peuple » en combattant le « nanny state » ultracentralisé mis en place par les Travaillistes. Donc une forme de décentralisation vers les local communities (que Thatcher, paradoxalement, détestait parce qu’elles étaient souvent contrôlées par les Travaillistes). Autre point amusant, Cameron explique que la différence fondamentale entre les Travaillistes et les Conservateurs est que le parti au pouvoir est « pessimiste » quant à la nature humaine et que cette défiance se traduit par une Etat plus centralisé qui décide à la place de l’individu, alors que son parti, lui, est plus optimiste et qu’il trouve donc qu’il faut redonner à l’individu le pouvoir dont les (Néo)Travaillistes l’ont privé. Thatcher privilégiait déjà l’individu contre l’Etat tout puissant (socialiste, donc crypto-staliniste dixit la Dame de fer), mais traditionnellement c’est plutôt l’inverse: une droite méfiante par rapport à la « bonté » de l’Homme et une gauche plus angélique. Les temps changent.

David Cameron, tout à sa plume, signe également une tribune dans l’Independent : en ces temps de crise, il faut lutter contre l’endettement de l’Etat et limiter la dépense publique, mais pas de manière indiscriminée: la cure d’amaigrissement de l’Etat doit refléter le « Conservatisme progressif » ou le « Progressime conservateur » (au choix) qui n’est pas sans rappeler le « Compassionate conservatism » des Républicains en 2000. Encore une fois, c’est assez vague, mais il s’agit de ne pas faire peur aux électeurs.

Une rupture travailliste?

Charles Clarke, ancien ministre de l’intérieur, explique dans une tribune parue dans le Guardian que les Travaillistes peuvent gagner la prochaine élection générale s’ils incarnent la rupture (alors qu’ils sont au pouvoir depuis 1997). L’idée générale est que la crise appelle des solutions de centre-gauche, et pas un Conservatisme qu’il associe (de bonne guerre) à Thatcher, et dont les différents gouvernements travaillistes depuis 1997 (dont il a fait partie) n’étaient que le prolongement. Il s’agirait donc de mettre un terme à un consensus (post-)thatchérien en vigueur depuis 1979.

L’Europe indispensable

Un éditorial de l’Independent rappelle enfin qu’entre les Etats-Unis et l’Europe, le Royaume-Uni ne peut pas s’en sortir seul et qu’il a plus que jamais besoin de l’Europe.

Lauric Henneton

Carte: évolution du chômage au Royaume-Uni

Le nombre de chômeurs a dépassé les 2 millions aujourd’hui, outre-Manche.

Le site de la BBC propose une carte interactive qui montre l’évolution du chômage au Royaume-Uni depuis septembre 2008. Très bien faite et très parlante, elle montre la rapide dégradation de la situation.

Lauric Henneton

Brit.Pol briefing

Dans les colonnes du Times, Peter Riddell s’interroge sur la place du Royaume-Uni dans l’Europe, alors que David Cameron a annoncé vouloir faire sortir le Parti conservateur du PPE (Parti Populaire Européen, centre-droit, dont fait partie l’UMP de Nicolas Sarkozy, la CDU d’Angela Merkel et Forza Italia de Silvio Berlusconi – sans oublier le parti de Manuel Barroso). Se posent également les questions de l’Euro, en temps de crise, et du Traité de Lisbonne: la position des Conservateurs, notamment de William Hague, est tout sauf claire sur le sujet.

Anthony Wells, pour l’excellent UK Polling Report, revient sur l’évolution des partis au pouvoir, en Grande-Bretagne, à l’approche d’une élection générale. A l’aide de graphiques très révélateurs, il montre que, contrairement à une idée reçue qui circule beaucoup en ce moment, il n’est pas vrai que le parti au pouvoir remonte dans la dernière partie de son mandat.

UK Polling Report

Source: UK Polling Report

Steve Richards, dans une chronique de The Independent, s’interroge également sur l’issue de la prochaine élection, au printemps 2010 et notamment sur l’hypothèse d’un « hung parliament« , où aucun des trois principaux partis ne serait majoritaire en sièges, comme ce fut le cas en 1974, année où eurent lieu deux élections, en février et octobre, dont les Travaillistes sortirent en tête, mais de très peu, et sans majorité (Harold Wilson, Premier ministre de 1964 à 1970, reprit du service pendant deux ans avant de laisser sa place à James Callaghan entre 1976 et 1979). Pour un certain nombre d’observateurs, un « hung parliament » n’est pas à exclure, en dépit des sondages, et c’est alors le troisième parti qui donnerait au parti arrivé en tête le nombre de sièges nécessaires pour obtenir une majorité. Ici ce sont les Libéraux-démocrates, et ils ne sont pas enthousiastes à l’idée de soutenir les Conservateurs (euphémisme). Richards expliquent que l’on murmure en coulisse que des discussions auraient lieu entre les Libéraux-démocrates et les Travaillistes, mais au-delà des dirigeants du parti, il faut que la base accepte de soutenir la majorité sortante – si d’aventure elle arrivait en tête mais sans majorité. Bref, beaucoup d’inconnues pour cette équation électorale dont le point de départ est la mauvaise position actuelle des Conservateurs non pas dans les sondages (elle est assez bonne) mais en terme de sièges à conquérir, à partir d’une base, actuelle, assez basse, à la suite des revers électoraux de 1997, 2001 et 2005. Malgré des sondages qui donnent régulièrement entre 10 et 15 points d’avance aux Conservateurs, il semble difficile de conquérir suffisamment de sièges pour disposer d’une majorité tout court, sans parler d’une majorité confortable.

I am still sceptical about the next election leading to a hung parliament. The close results in 1974 are the exception to the normal pattern. Nonetheless the arguments are starting to pile up in favour of an indecisive outcome. The Conservatives need to win a 1997 type swing in reverse to secure a majority. Currently they have fewer seats than Labour won under Michael Foot in 1983. The distribution of seats continues to favour Labour. The Liberal Democrats tend to perform well in the seats they already hold and will be hard for the Conservatives to remove.

La BBC annonce pour sa part que les présidents d’universités britanniques (en réalité les vice-chancellors) demandent une hausse du plafond des droits d’inscription, voire, pour certains, leur disparition pure et simple. Rappelons que les plafonds en questions avaient été relevés à £3,000 en 2004 (mis en place à la rentrée 2006). (Voir la chronologie de la BBC).

Enfin, un ancien maire d’Oxford relance le débat sur la monarchie, qu’il voudrait voir disparaître au profit d’une république. Les arguments sont classiques: une monarchie, surtout héréditaire, est archaïque et contraire à la démocratie (puisque la Reine a bien des pouvoirs constitutionnels) et qu’elle coûte cher, surtout en cette période de crise (£40m par an, soit, d’après un calcul rapide fait par l’Oxford Mail, 66p par habitant et par an).

Lauric Henneton