Archives de Tag: Ecosse

Brit.Pol.Briefing 27.11.09

Philip Blond, le ‘Red Tory’, n’en finit pas de faire couler de l’encre, notamment dans le Guardian, sous la plume des chroniqueurs Michael White (David Cameron and the Red Tory Philosopher) et John Harris (Blond’s Day in the Sun). Voir également cet article publié en août sur le site du Guardian.

De même, le sujet d’un hypothétique parlement minoritaire (‘Hung Parliament’) a suscité deux remarquables chroniques, de Martin Kettle, du Guardian (Hung Parliaments are good only for Whips and Scribblers) et Bagehot, pour The Economist (Year Zero: Why the impending general election will be unlike any other).

Deux autres articles à noter:

Some in GOP Seek Lessons in U.K.’s Tory Revival (Wall Street Journal) et l’éditorial du Times, intitulé Union Man et sous-titré « Cameron should endorse Sir Kenneth Calman’s plan to strengthen the Union« , qui traite de la dévolution des pouvoirs à l’Ecosse, sujette à révision.

Lauric Henneton

 

La conspiration anti-Brown, ou comment se débarrasser de son leader

Peter Brookes / The Times

Peter Brookes / The Times

Au lendemain d’élections locales marquées par une large victoire conservatrice (qui préfigurerait celle à venir aux législatives?), Gordon Brown a remanié son cabinet, mais la fronde à son encontre ne diminue pas. Au contraire, les backbenchers (députés sans portefeuille ministériel) sont activement engagés dans une dynamique anti-Brown, faisant suite aux nombreuses démissions dans son cabinet (elles-mêmes à l’origine du remaniement).

Le Guardian propose une petite FAQ pour comprendre rapidement les enjeux de la situation actuelle.

Les paragraphes suivants permettent de bien saisir l’humeur des Travaillistes:

But a new poll of Labour activists brought further bad news for the prime minister, revealing that fewer than half of all party supporters want him to lead them into the next general election, with one in five urging him to quit now.

The poll of 800 party members carried out by YouGov for Channel 4 News found that one in three thought Labour stood no chance of winning a general election if Brown remained leader and 53% thought they would be better off if Tony Blair was still in Number 10.

On s’observe, on se demande qui y va, quand y aller, mais le « coup » est en train de se mettre en place. Les résultats des Européennes, dimanche, seront peut-être le signal du départ, mais ce serait peut-être prématuré. Et les « rebelles » ne sont peut-être pas (encore) assez nombreux pour pousser Brown à la démission. On saura lundi soir, au terme d’une réunion des députés travaillistes, si une pétition (qui doit compter 75 signatures) a été présentée.

Un autre article du Guardian permet de bien comprendre la réflexion des ‘rebelles’.

Si une attaque n’est finalement pas tentée lundi, il faudra attendre le projet de loi de privatisation partielle de Royal Mail qui pourrait être présenté en juin et devrait entraîner une levée de bouclier à gauche. La loi pourrait être votée uniquement grâce à l’appui des Conservateurs. Sauf s’ils retirent leur soutien pour faire chuter le Premier ministre. On peut aussi envisager une motion de défiance, comme en mars 1979, quand l’échec des référendums sur la dévolution avait entraîné le dépot par les nationalistes écossais mécontents d’une motion de défiance dont la principale bénéficiaire fut Margaret Thatcher. Un revers sur la Poste pourrait avoir les mêmes conséquences.

L’étape suivante est la convention annuelle (conference) du parti, fin septembre, avec l’élection du leader. On peut imaginer une candidature de contestation qui réunirait assez de soutien pour provoquer un deuxième tour de scrutin. On serait dans un scénario analogue à la fronde contre Margaret Thatcher en novembre 1990… ou la fronde contre Edward Heath en 1975, qui avait amené l’élection surprise de Margaret Thatcher comme leader du parti conservateur. En cas de retrait de Brown, on peut imaginer la candidature d’Alan Johnson comme homme du consensus, un peu à la manière de John Major, en attendant des législatives qui auront lieu d’ici à juin prochain et dont les Conservateurs devraient être les grands vainqueurs. Il faudra également observer le score des libéraux-démocrates, arrivés à la deuxième place lors du scrutin local, et probablement des européennes. Ils pourraient bien, au moins un temps, profiter de la mauvaise santé du parti travailliste pour devenir le principal parti d’opposition, sans pour autant avoir beaucoup gagné en voix.

Lauric Henneton

Vidéo: Un thriller politique: La chute du gouvernement Callaghan (mars 1979)

James Callaghan

James Callaghan, la victime

BBC Parliament a diffusé il  y a quelques jours un documentaire très bien fait qui revient sur la chute du gouvernement travailliste de James Callaghan (1976-1979), en mars 1979, suite à une motion de censure des nationalistes écossais, dans le contexte social très tendu du ‘Winter of Discontent‘.  Ce documentaire d’une heure peut à présent être consulté en ligne, gratuitement.

De facture assez classique, il fait intervenir les protagonistes de l’époque (encore vivants), qui ont tous pris 30 ans (et ont presque tous été annoblis). Cependant, il permet de bien comprendre la situation générale du pays, notamment le contexte politique et social, et les différentes questions qui se télescopent (l’inflation, les revendications salariales, les grèves, la dévolution).

Le documentaire permet également de bien comprendre le fonctionnement du Parlement, et met en avant le rôle des ‘whips‘, charger de s’assurer que, lors des votes cruciaux où toutes les voix sont nécessaires, aucune défection ne sera à déplorer, lesquelles pourraient, dans certains cas, faire chuter le gouvernement.

Ici, l’histoire est bien connue (mais la narration est habile): on savait que l’issue du vote ne tiendrait qu’à un fil, ou plutôt une voix, et c’est ce qui s’est passé. La Chambre des Communes, par 311 voix contre 310, n’a pas accordé sa confiance au gouvernement Callaghan, qui a dû démissionner et provoquer des élections législatives au début du mois de mai. C’est à l’issue de ce scrutin que Margaret Thatcher, leader du Parti conservateur depuis 1975, est devenue Premier ministre.

A la suite, il y a une vidéo de George Cunningham, député travailliste écossais à l’origine de l’amendement qui stipulait que 40% de l’électorat (inscrit) écossais devait approuver le projet de dévolution pour que la loi votée l’année précédente soit appliquée. Une majorité simple ne suffisait pas, et c’est ce qui s’est passé: 51% de « oui » mais pas assez de votants. C’est à l’issue de cet échec, début mai, que le Scottish National Party (SNP) a déposé une motion de censure (vote of no confidence) contre le gouvernement Callaghan.

Dans son discours, le soir du vote (28/03/1979), Callaghan a dénoncé l’alliance contre-nature qui s’opposait à son gouvernement: les Conservateurs opposés à une dévolution qui signifiait pour eux le démantèlement de l’Union, un SNP qui voyait dans la dévolution un premier pas vers l’Indépendance de l’Ecosse, et les Libéraux, qui étaient favorables à la dévolution.

Lauric Henneton

Chambre des Communes, Westminster

Chambre des Communes, Westminster: le lieu du crime

Victoire des Conservateurs ou défaite des Travaillistes?

Un sondage réalisé auprès des membres du Parti conservateur par le blog ConservativeHome montre que le retour au pouvoir des Conservateurs au printemps 2010 sera dû bien plus aux faiblesses et aux échecs, voire à l’impopularité des Travaillistes au pouvoir qu’aux forces et aux atouts des Conservateurs, notamment les cinq grands piliers de la « décontamination » du Parti auprès de l’opinion après plus de dix ans passés dans l’opposition (depuis le raz de marée qui a porté Tony Blair au pouvoir le 1er mai 1997).

  1. Labour’s economic failure: 34.2%
  2. The unpopularity of Gordon Brown: 19.6%
  3. Labour has been in power too long: 13.4%
  4. David Cameron’s message of change and leadership qualities: 11.5%
  5. Labour’s general failure: 11%
  6. Getting rid of the things voters didn’t like about the Conservatives: 2.2%
  7. The strength of the Tories’ ‘top TV team’: 2.1%
  8. Positive Tory policies on inheritance tax, Lisbon Treaty etc: 1.7%
  9. The Tories’ economic message that Britain is already indebted enough: 1.7%
  10. The creation of a gentler, greener conservatism: 1.1%
  11. The weakness of the Liberal Democrats: 0.7%
  12. The strength of the party organisation: 0.5%
  13. Wooing of the BBC and Guardian: 0.1%

La même tendance apparaît quand on demande de noter ces facteurs de 1 à 10:

  1. Labour’s economic failure: 8.67
  2. The unpopularity of Gordon Brown: 8.49
  3. Labour’s general failure: 7.85
  4. Labour has been in power too long: 7.61
  5. The Tories’ economic message that Britain is already indebted enough: 6.79
  6. David Cameron’s message of change and leadership qualities: 6.78
  7. Positive Tory policies on inheritance tax, Lisbon Treaty etc: 6.36
  8. The strength of the Tories’ ‘top TV team’: 6.20
  9. Getting rid of the things voters didn’t like about the Conservatives: 5.74
  10. The strength of the party organisation: 5.48
  11. The weakness of the Liberal Democrats: 5.11
  12. The creation of a gentler, greener conservatism: 4.76
  13. Wooing of the BBC and Guardian: 4.42

Ce qui confirme que, comme c’est souvent le cas, une élection sanctionne plus le parti au pouvoir qu’elle ne consacre l’opposition. Ou plutôt que c’est en punissant le parti au pouvoir que l’on consacre l’opposition. En 1997, le raz de marée travailliste avait été en grande partie également un raz de marée anti-conservateurs (lesquels conservateurs n’avaient même pas réussi à garder un siège en Ecosse et au pays de Galles).

Lauric Henneton

La perspective d’une Ecosse indépendante s’éloigne

D’après le Financial Times, un front commun travailliste-conservateur et libéral-démocrate s’est constitué contre la perspective d’un référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, qui, en ces temps de crise, serait suicidaire, selon les opposants à l’indépendance.

Lauric Henneton

Coup d’arrêt à l’indépendance écossaise?

Dans une première version de son rapport, attendu l’année prochaine, la commission Calman, chargée d’évaluer la dévolution des pouvoirs à l’Ecosse, a reconnu que le processus avait été un succès, globalement, mais que l’Ecosse ne pourrait pas bénéficier de sa propre politique fiscale.

Celle-ci serait incompatible avec un état-nation, et pour la même raison les questions de défense et de sécurité nationale resteront gérées par Westminster (donc le parlement de tout le Royaume-Uni).

Voilà qui pousse à poursuivre la réflexion sur la nature du Royaume-‘Uni’: état unitaire? état quasi-fédéral? l’indépendance de l’Ecosse est-elle réaliste? est-elle souhaitable?

Il semble que, pour l’instant, le refus de transférer les pouvoirs fiscaux, sans parler des pouvoirs en matière de défense, porte un coup d’arrêt au transfert des pouvoirs dits régaliens au Parlement écossais à Holyrood. Reste à savoir si et quand un éventuel référendum aura(it) lieu, et quelle en serait son issue.

Le rapport propose une contextualisation assez détaillée (qu’est-ce que la dévolution? quels pouvoirs ont été transférés? etc.) et les plus pressés pourront consulter directement le « summary » (ch. 9).

Lauric Henneton

La crise profite à Gordon Brown

La crise économique et financière a permis à Gordon Brown de revenir sur le devant de la scène à un moment où il semblait politiquement fini.

Hier, le candidat travailliste à l’élection (législative) partielle de Glenrothes (Ecosse), voisine de la circonscription de Brown, a emporté une victoire aussi claire qu’inattendue sur son adversaire nationaliste (SNP). [Voir BBC et Times] Une défaite, après la série d’échecs cuisants du printemps et de l’été, aurait peut-être coûté son poste au Premier ministre. Brown s’est investi personnellement dans la campagne et il semble que cela ait payé.

Brown émerge du contexte de crise comme une sorte de sorcier de l’économie, et c’est – en partie – ce qui a mis un terme à l’état de grâce des nationalistes, dont le leader, Alex Salmond, est aussi first minister de l’exécutif écossais et fervent partisan de l’indépendance écossaise. C’est le grand perdant de cette élection locale, aux répercussions nationales.

La cause de l’indépendance écossaise est particulièrement mise à mal par le contexte économique et l’incapacité d’une Écosse indépendante de s’en sortir seule, donc sans l’intervention du gouvernement britannique et de la Banque d’Angleterre.

Le candidat libéral-démocrate arrive quatrième, derrière le candidat conservateur, ce qui constitue, en soi, un sérieux revers. Les libéraux-démocrates sont généralement mieux placés en Ecosse et au pays de Galles que les Conservateurs, toujours lourdement pénalisés par le souvenir de Margaret Thatcher.

Lauric Henneton

Ce que les Tories ont à gagner de l’indépendance écossaise

Un excellent article de l’excellent magazine britannique Prospect explique pourquoi les Conservateurs, malgré leur unionisme presque définitoire, ont tout à gagner d’une Ecosse indépendante – si d’aventure un éventuel référendum, à l’horizon 2010, allait dans ce sens, ce qui est encore assez improbable dans la mesure où les partisans de l’indépendance peinent à dépasser les 30%.

Au contraire, autant les (néo)travaillistes de Gordon Brown, dont les succès électoraux dépendent souvent de l’apport des voix écossaises, que les nationalistes du SNP, actuellement aux commandes en Ecosse (Alex Salmond en est le first minister), ont beaucoup à y perdre.

Tout le paradoxe tient au fait que

– historiquement, les Tories ont toujours été viscéralement attachés à l’intégrité du Royaume-Uni (contre l’indépendance de l’Irlande, par exemple),

– les nationalistes du SNP ont toujours été les plus fervents partisans de l’indépendance (qui mettrait l’Ecosse dans une situation délicate, économiquement, en temps de crise financière et économique)

– ce sont les néotravaillistes, au début du premier mandat de Tony Blair, qui ont rendu possible la « dévolution » des pouvoirs à l’Ecosse (et dans une moindre mesure au pays de Galles).

Lauric Henneton

Rénovation du Labour Party

Un article de la BBC sur les candidats à la succession de Wendy Alexander à la tête du Labour écossais. W. Alexander a démissionné après avoir été impliquée dans une affaire de corruption.

L’Ecosse est un fief travailliste, mais il est mis à mal par le parti nationaliste (SNP) qui a emporté une élection partielle à Glasgow East jeudi 24. (voir le dossier du Guardian et celui de la BBC ainsi que l’article de The Economist, qui fournit une excellente synthèse de la situation)

C’est un nationaliste, Alex Salmond, qui est à la tête de l’exécutif autonome d’Ecosse (dans le cadre de la « dévolution » des pouvoirs à l’Ecosse et au pays de Galles depuis 1997. Salmond envisage de soumettre à référendum l’indépendance de l’Ecosse, ce à quoi tous les autres partis s’opposent. La mission du futur leader travailliste écossais sera notamment de gérer la relation avec l’exécutif et de redorer l’image d’un parti bien ternie, comme le montre la défaite aussi lourde qu’humiliante de Glasgow East, bastion travailliste.

Cette défaite contribue à affaiblir encore un peu plus un Gordon Brown en poste depuis un an. Brown, artisan d’une politique économique centriste depuis son arrivée à l’Echiquier en 1997, est actuellement obligé d’accorder des concessions aux syndicats, ce qui devrait contribuer à un virage à gauche en matière économique et sociale.

Le problème principal est que le parti, quand il était fortement ancré à gauche dans les années 1980, était une machine à perdre (1979, 1983, 1987 et 1992 contre toute attente), alors que Tony Blair, en recentrant le parti, en a fait une machine à gagner (raz de marée en 1997 puis victoires en 2001 et 2005). Les prochaines élections ne devraient pas avoir lieu avant 2009 au plus tôt. Les Conservateurs, avec David Cameron à leur tête, devraient profiter de l’usure du pouvoir des travaillistes pour emporter ce qui semble – aujourd’hui – une large victoire en termes de sièges.

Ce virage à gauche contribuera-t-il à ringardiser le parti aux yeux des électeurs de « Middle England » indispensables pour une victoire travailliste, ou au contraire, en contexte de ralentissement économique, à revigorer un parti essoufflé?

En effet, le parti voit les soutiens financiers s’envoler et ne peut plus guère compter que sur les syndicats, d’où les concessions, un peu forcées.

[ADDENDUM] Un sondage Times/Populus, réalisé à la suite de l’élection partielle de Glasgow East, montre que les Travaillistes sont toujours aussi bas dans les sondages (27% contre 43% pour les Conservateurs et 18 pour les Libéraux-Démocrates), mais que cette mauvaise image n’est même plus liée à la personne de Gordon Brown puisqu’un changement de premier ministre ou un remaniement ne changerait pas grand chose aux yeux des personnes interrogées.

Lauric Henneton